Nouvelle convention chômage: les cadres touchés de plein fouet ?

  • Rupture Conventionnelle
  • 06 Janvier 2021
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A partir du 1er juillet, pour les cadres qui partiront de leur entreprise avec un chèque égal ou supérieur à 16 200 euros, la période de carence atteindra le nouveau plafond institué à 180 jours au lieu de 75 jours actuellement.

Reuters/Suzanne Plunkett

 

Dès le 1er juillet 2014, la nouvelle convention d'assurance chômage, qui devrait être agréée par le ministère du Travail dans les prochains jours, instaure une nouvelle période de carence -le temps d'attente pour percevoir son allocation chômage- pour les salariés licenciés pour une raison autre qu'économique, et pour ceux qui signent une rupture conventionnelle. Une mesure qui sanctionne les plus hauts salaires et donc les cadres qui auront négocié des indemnités supra légales importantes. 

En clair: avec un chèque de départ négocié égal ou supérieur à 16 200 euros, la période de carence atteindra le nouveau plafond institué à 180 jours au lieu de 75 jours actuellement. Six mois de plus donc. "L'indemnité transactionnelle va effectivement être incluse dans le calcul du délai de carence", confirme Vincent Bourgeois, avocat en droit social. Un calcul qui se fera en mettant en regard le salaire journalier de référence et la somme touchée lors du départ afin de déterminer si le délai est atteint. Selon l'Unedic, cela concerne environ 40 000 personnes par an pour une économie estimée à 600 millions d'euros d'ici à 2016. 

Inclure cette donnée dans la transaction

" Les cadres subissent cette nouvelle convention de plein fouet ",

estime Thierry Krief, de NegoAndCo, qui les accompagne dans leurs négociations de départ.

Entre le délai de carence actuel et le nouveau, prenant en compte les indemnités supra légales,

"certains vont perdre jusqu'à quatre mois et demi d'assurance chômage",

a-t-il calculé.

L'indemnisation représentant 57,4% du salaire brut, Thierry Krief considère qu'ils devront intégrer une perte supplémentaire de deux mois et demi d'indemnisation environ dans leur future négociation. 

Ce qui, "pour un cadre qui négocie six mois de salaire avec son employeur, est très préjudiciable", constate-t-il. Exemple de calcul: un cadre supérieur négocie 60 000 euros d'indemnités supra légales. Il touche, en poste, un salaire de 8000 euros mensuels. Pôle emploi lui versera environ 4000 euros par mois. Avec les 180 jours de carence, il percevra, durant cette période, l'équivalent de six mois d'indemnités, soit 24 000 euros. Au final, sa transaction lui rapportera donc 36 000 euros nets. "Il n'y a pas d'astuce pour y échapper", alerte Vincent Bourgeois, le montant de l'indemnité de licenciement étant transmise à Pôle emploi via l'attestation de l'employeur. Au final, chaque salarié doit avoir en tête de l'inclure a priori dans son calcul pour se préparer.  

Vers plus de contentieux?

Ce que prévoient les juristes et, par conséquent, que redoutent les entreprises: une hausse des contentieux devant les conseils de prud'hommes pour obtenir des indemnités qui échapperont alors à cette nouvelle règle. "Dans ce cas là, les cadres toucheront ces sommes après le chômage", explique Vincent Bourgeois. Et ne seront donc pas soumis à ce long délai de carence. Le pari est risqué pour les salariés, compte tenu de l'incertitude d'une procédure judiciaire et les délais d'instruction. Mais il peut être tenté dans des situations très tendues. 

Et cela va, de fait, changer l'orientation des discussions - et de leur climat - entre employeurs et cadres en difficulté. D'aucuns prédisent en conséquence une baisse de l'utilisation des ruptures conventionnelles qui prévoyaient, pour un quart d'entre elles, une indemnité supérieure 50 % du minimum légal, d'après le ministère du Travail. Un possible effet collatéral à suivre. 

Par Manuel Jardinaud 

https://www.lexpress.fr/emploi/gestion-carriere/nouvelle-convention-chomage-les-cadres-touches-de-plein-fouet_1553447.html